La difficulté, dans un scénario, est d’essayer de ne pas courir trop de lièvres à la fois. Écrit par Gilles Taurand et Katell Quillévéré, celui du Temps d’aimer aborde plusieurs sujets et l’on se dit que chacun d’eux aurait mérité d’être un peu plus approfondi. De la femme tondue à la Libération à l’enfant qu’on ne peut pas aimer, de l’homosexualité au désir de vivre après la guerre, des difficultés du couple à l’éducation des enfants et la place de la femme dans la société des années cinquante en passant par les aberrations sociétales — l’épouse qui demande un chéquier à son mari, l’homosexualité punie par la loi —, on se demande si tout cela ne fait pas un peu trop pour un seul film.
D’après une histoire inspirée par sa propre grand-mère et sur un rythme assez lent, Katell Quillévéré pose son film sur les épaules d’Anaïs Demoustier et Vincent Lacoste, deux acteurs parfaits, encore que Lacoste soit ici en-deçà de ses habituelles capacités, jouant d’une façon trop froide les affres de son personnage.
Le film démarre sur le drame des femmes tondues et la cinéaste mêle adroitement images d’archives et scènes reconstituées. Une fois le récit amorcé, on va suivre le parcours d’une jeune fille tombée amoureuse — puis enceinte — d’un Allemand en pleine Occupation. Malgré de beaux passages, l’émotion n’affleure pas aussi souvent qu’on aimerait. Ces (meilleures) scènes qui parcourent Le Temps d’aimer concernent surtout le premier fils du personnage d’Anaïs Demoustier. D’autres se rapprochent parfois trop du cliché et c’est dommage car on aurait voulu une œuvre davantage maîtrisée, moins proche d’un téléfilm. Pourtant, Katell Quillévéré n’évite pas les audaces, telle cette séquence sexuelle avec le GI américain.
Le Temps d’aimer, un film que l’on aurait aimé apprécier davantage encore, reste malgré tout une belle histoire avec cette poursuite d’un bonheur toujours refusé.
Jean-Charles Lemeunier
Le Temps d’aimer
Année : 2023
Origine : France
Réal. : Katell Quillévéré
Scén. : Katell Quillévéré, Gilles Taurand
Photo : Tom Harari
Musique : Amine Bouhafa
Montage : Jean-Baptiste Morin
Durée : 125 min
Avec Anaïs Demoustier, Vincent Lacoste, Morgan Bailey, Paul Beaurepaire…
Sortie en salles par Gaumont le 29 novembre 2023.